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Dimanche 24 mai 2009 à 19:42

Loor versus Yuerawen ou Dialogue

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- Donne-nous une chance.
- A quoi bon donner une chance à une vie en sursit ? Nous sommes mortes il y a 3 ans.
- Non, je ne suis pas morte, je suis là, je vis, j'aime et suis aimée.
- Tout ce que tu entreprends, tu le gâches, tu le gâtes. C'est le fatum. Tu es belle et bien morte. Cadavre.
Un son diffus.
- Entends ! Le glas funèbre des cloches. Elles sonnent notre arrivée sur le Styx. Hadès nous accueille. Rends-lui hommage, dépouille.
- Je ne vois pas. Je suis dans mon lit, là, près de mes livres, près de mes photos... Près de...
- Souvenirs que tout ça ! Tiens, regarde-toi.
Miroir.
- Non, je ne suis pas...
- Si, tu es cette personne, regarde ! Contemple ta beauté nouvelle, les vers te vont si bien, n'est-il pas ? Oh, et là, vois ! Un morceau de ta dentition qui dépasse. Jolie joue. Très beau teint.
- Dieu, arrêtez mes douleurs.
- Qu'elle sotte tu fais, Dieu n'y est pour rien dans l'affaire. Nous sommes mortes, nous sommes elle ! Apprends.
- Cauchemar, ceci est un cauchemar. Rends-moi la vie, Loor !
- Faible petit être en sursit. Crois-tu que je veuille déambuler dans les rues habillée de ton corps ? Maintenant que tu es ici, tu es belle, tu me conviens. La vie est laide, je n'en veux point. Voguons sur les eaux, explorons ce monde, car il est nôtre, car il est mien. Admire mon royaume !
- Sors ! Sors de mon corps, de ma tête, Loor, tu m'es plus mon amie.
- Je ne l'ai jamais été.
Silence.
- Je suis toi. Ta soeur. Ton amante. Appelle-moi comme tu veux, rien n'y fera. Je suis inhérente à ta vie, ainsi qu'à ta mort. Mais ici, j'ai tous mes pouvoirs, je recouvre enfin mes forces. Sur Terre, j'étais confinée dans ta stupide cervelle. Humaine ! Ici, je suis maîtresse de ton corps.
- Rends-moi ce qui m'est dû. Rends-moi ma vie, ma famille, mon amant, mes amis.
- Ta famille ? Laisse-moi rire. Tu veux parler de ce père trop lâche pour te regarder dans les yeux ? Tu veux parler de cette mère qui te pense malade ? Et ton amant, tu l'as perdu, il n'est plus tien. Il ne t'aime plus. Mais... à dire vrai, il ne sait ce qu'est l'amour. Moi, je sais. Moi, je t'aime. Enfin, tes amis, ne m'en parles pas. Tu n'as pas d'amis, petit oiseau. Ils te haïssent tous, comme tu les as haïs. Grâce à moi. Grâce à moi tu t'es élevée à un nouveau rang. Supérieur. Tu es immortelle. Tu vis dans la mort. Tu es mienne. Tu ne t'appartiens plus, charogne.
- Je ne veux pas de tes chairs pourrissantes, je ne veux pas de ces vers que tu chéries tant. Je ne veux pas d'une peau bleuie par l'absence de vie. Je veux vivre.
- Tu ne disais pas ça, il y a 3 ans...
- Il ne s'est rien passé, cette année-là !
- Ton suicide, ce n'est rien, peut-être ? Pardon d'accorder de l'importance à certains moments de ta vie, enfant.
- Tu m'as poussée au suicide, je suis morte par ta faute ! Non, non, non... ! Je suis vivante, tu me perds, tu m'entraînes dans des contrées odieuses. Tout ça est trop malsain, tu n'es pas moi, tu ne peux pas être moi. Je suis...
- Morte ? Ahah, pardon. Je ne devrais pas me gausser de toi. Il y a 3 ans, tu m'as invoquée... Pour que je t'aide...
- ... A survivre.
- A mourir. Mais, dis-moi, tu ne te trouves pas un peu gluante, et froide ? Physiquement parlant, j'entends.
- Tu me répugnes.
- Tu te répugnes toute seule, accepte. Cessons ces chamailleries, j'en ai la migraine. Tiens, regarde, ce bon vieux molosse nous souhaite la bienvenue !
Se tourne vers Cerbère.
- N'est-il pas plaisant à l'oeil ? Je trouve ses 3 têtes d'un esthétisme... !
- Quelle monstruosité.
- Quelle merveille, tu veux dire. Je pourrais t'en montrer d'autres. Je t'y contraindrais, de toute manière. Je dois visiter ma chère amie Méduse. Tu en as sûrement ouïe dire. Je te rassure, elle est beaucoup moins belle que nous, maintenant, tu n'as pas à l'envier.
Silence.
- Quoi, tu n'es pas heureuse ?
- Tu ne m'entends pas.
- Si fait, que je t'entends ; je ne t'écoute pas. Nuance.
- Je veux vivre.
- Continues à radoter et je te prive de ta langue.
- Tu as raison, les morts ne parlent pas. Pourquoi avons-nous ce dialogue, alors ?
- Ah, mais parce que nous sommes divines. Enfin, pour ma part. J'étais là bien avant que tu n'existes, et je serai là bien après que tu sois retournée à la terre.
- C'est déjà le cas, non ? Pourquoi suis-je encore là ? Ton discours n'a ni queue ni tête, je suis folle. Je me fais la conversation.
- Des plus agréables, d'ailleurs.
- Je ne suis pas morte.
- Presque, mais c'est tout comme.
Paysage.
- J'avais pourtant dit à Hadès de ne pas se faire sponsoriser par Nike, m'écoutera-t-il donc un jour ?
- Oh ! Je rêve.
- Plus ou moins, oui. Je ne peux pas te le cacher. Physiquement tu es là-bas, à baver dans tes draps. Mais, psychiquement, tu es ici. Et comme nous le savons toi et moi, c'est le psychisme, qui compte. N'as-tu pas, à ce propos, rédigé une théorie là-dessus ? Des plus exquises, m'est avis.
- Je préfèrerais que tu ne portes pas de jugements sur mes écrits, ça me blesse plus qu'autre chose. Oui, avant, je voulais ton accord pour tout. Mais, recevoir des compliments d'une personne d'un si mauvais goût... Pouah, qu'elle idiote j'ai fait.
- Ca, je te l'accorde.
- Non, je n'en veux pas, merci bien.
- Ah tu te rebelles ! Traîtresse ! Indisciplinable, c'est ça qui te perdra, petite fille !
Silence.
- Oh, je vois de nouveau ! Les livres, mes chers livres, comme je les aime.
- Foutaise que tout cela. Il n'est rien de plus aimable que les Enfers. Et je crois que...
- Loor ?
- Oui ?
- Tu es morte.
- Quel scoop.
- Moi pas.
- Bien sûr que si. Comment voudrais-tu que je meurs sans toi, étant donné que je suis toi ? C'est absurde.
- Absurde, mais faisable. Regarde, je me détache. Tu n'es plus moi, tu es une larve.
- Oh, tu n'es pas très polie, je risque de me vexer !
- Fais donc, je ne m'en soucis plus.
Silence.
- Adieu Loor.
- A bientôt, Yuerawen.

Dimanche 24 mai 2009 à 19:35

Une si jolie petite fille


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Une si jolie petite fille... Oh oui, pour être jolie, elle l'était.
C'était le genre de beauté froide, triste, torturée, distante.
Et plus cette petite fille souffrait, plus elle était belle et plus elle resplendissait.
Et plus sa beauté se renfonçait, plus la petite fille souffrait.
C'est que, voyez-vous, cette petite fille ne connaissait que la douleur, et forcément, elle l'aimait.
A chaque fois qu'elle rencontrait le bonheur, elle gâchait tout.
Cette petite fille aimait souffrir.
Et grâce à cette souffrance, elle créait, et plus elle créait, plus elle souffrait.
Et plus elle souffrait, plus son corps dépérissait et plus elle comprenait.
Et plus elle comprenait, plus son corps dépérissait.
Plus elle mourait et plus elle était belle.
Belle de cette beauté froide, triste, torturée, distante.
Et plus elle était belle, plus les autres la haïssaient.
Et plus ils la haïssaient, plus elle souffrait, créait et resplendissait.
Cette petite fille, devenue trop fragile pour le monde qui l'environnait, mourut de son art,
de sa fièvre, sa soif de connaître, de comprendre, de souffrir et d'être belle.

Samedi 23 mai 2009 à 17:25

La Beauté Droïde

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Ce fut dans ses yeux que je remarquais pour la première et la dernière fois son humanité. Sa porte ouverte sur l'âme. J'y lu tant de choses à la fois ; trop de choses. J'y lu l'Amour, la Haine, la Passion et l'Indifférence. La Joie et la Peine. Elle était le Centre des émotions.
Aucun humain n'était plus vivant qu'elle en cet instant précis. Elle incarnait le Dernier Refuge, l'endroit où tout sentiment se réfugiait, se concentrait pour se ressourcer. Pour la première fois, quelqu'un, Elle, frôlait la Vie. Nous autres, humains, n'étions que de simples lambeaux de chair maladroitement cousus ensemble. Nous n'étions que de vagues chimères de ce qu'aurait été la Vie si elle avait été accordée à tous.
Nous n'étions que des cadavres marchant, parlant, gesticulant. Et Elle... Elle était la Vie. La Vie et les Emotions. L'on aurait pu se perdre dans la profondeur de son regard. Elle était belle. De cette sorte de Beauté que la Vie nous insuffle. Ses simulacres d'expressions faussement humaines n'avaient plus de raison d'être sur son si joli visage. Elle qui était l'emblème tant adulé de la Beauté Plastique, de la Beauté Droïde.
Son visage de fausse chair ne bougeait plus, figé dans une expression neutre. Aucun sourire, pas un battement de cil. Tout s'exprimait dans la tempête de ses pupilles.
Et pour la première et dernière fois, je vis Droïde être plus humaine que tous nos semblables passés, présents, futurs.
Et ce concentré de Vie, cette énergie à l'état pur me prit, jouant avec mes membres et mon esprit. Je n'étais plus. Je n'existais plus, transporté par la Jouissance.
Et je fus Elle, je fus Droïde dans les derniers instants qui précèdent la Mort.
"Porte-moi, Jouissance !"

*
* *

- "Eh merde ! Il est mort ! Dis papa, tu veux bien me racheter un autre humain ?"

Samedi 23 mai 2009 à 15:46

 
Journal d'un cyborg


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            Je marchais, les bras balants, la tête basse, borg que j'étais, prisonnière des chaînes de l'Education. Le vent sifflait, la femme avançait toujours, devant moi. Le ciel, de son gris quotidien, me narguait, se mouvant comme l'une de ces catins que l'on payait en échange d'un petit moment de bonheur, ou d'illusion, à vous de choisir. Il m'appelait, alléchant, m'incitait à le rejoindre, à danser avec l'une de ses sirènes de filles. Mais je n'avais pas d'ailes.

Je marchais donc, la queue entre les jambes, petit rouage perdu au sein d'un immense engrenage.

            Et la femme me conduisait, toujours, des heures durant, vers ces colossaux bâtiments d'apprentissage. Il était froid, le temps était aux pleurs et à l'impuissance. La poussière, de son gris coutumier, courait, poussée par les airs. Un violon désaccordé, sorti de je ne sais où, se fit entendre, formant une suite de notes dissonantes, comme essoufflées. La musique se joignait aux milliers d'élégies hurlées par des milliers d'oiseaux bafoués, violés par l'énorme chose contre-nature qui s'élevait jusque dans les nues, qui se perdait jusqu'aux bords de l'horizon. Cette monstruosité, cette horreur impensable, souriait de toutes ses dents carnassières. Ses pensées inhumaines me suivaient où que j'allais, sa voix me sussurait à l'oreille, nuit et jour, déposant en mon esprit, son lit de douleur. Ses griffes vengeresses me déchirant, laissant mes tripes de métal pendre pathétiquement hors de mon corps mi d'acier mi de chair.

            Enfin, je franchis les grandes portes coulissantes. L'intérieur du local était sombre et glacial. La troupe d'écrans plats me faisait désormais face, me répétant sans cesse telle et telle loi. Je préférais détourner le regard, me concentrant sur le dos de la femme. Elle était humaine, cela ne faisait aucun doute. Mais où était passée son âme ? Elle déambulait, le pas raide, comme l'un de ces droïdes qui dataient de l'avant-guerre, simulacres vaguement humains. Le droïde-femme ne m'adressait pas la parole, débordée par je ne sais quelle paperasse administrative imaginaire. Elle était bel et bien morte, et pourtant, elle marchait. Elle marchait de son pas raide et saccadé.

            Je me demandais ce qui avait bien pu la faire changer à ce point. Un lavage de cerveau, sûrement. Une petite piqûre, un film ou deux, de la propagande à tout va. "Si vous faites ce que l'on vous DICTE, vous monterez l'échelle sociale jusqu'au summum." Mais, personne, malheureusement, ne comprennait que seuls les hauts-nés pouvaient diriger. Notre système politique, se nommant lui-même Démocratie, ressemblait étrangement à une monarchie. Les mêmes familles se passant le pouvoir de génération en génération, le Grand Conseil rempli de gens à la cervelle écrasée. En un mot, inefficace. Et la planète tournait, peuplée de créatures désespérées, naïves ou sans jugeote aucune.

            Il fallait maintenant prendre à droite, si je voulais en finir pour cette nuit. Le corridor était sordide, comme si quelque crime innommable s'y était produit. Des traces de moisissures décoraient les murs d'un blanc sale. Les plafonniers, vétustes, éclairaient l'endroit par intermitence. L'air était humide et désagréable, des odeurs fugaces, peu rassurantes, flottaient çà et là. La porte, de son gris habituel, me faisait des gestes obscènes, tout en restant immobile aux yeux de tous. Peut-être avait-elle été placée là pour me conduire à ma perte, pour me rappeler, comme ces écrans, comme cette bète contre-nature, que je ne pouvais gagner, que jamais aucune issue ne se présenterait à moi. Peut-être aussi était-elle là pour fermer la pièce qui contenait les valises. Qu'en sais-je ?

            La femme-morte, pour la première fois, se retourna, après avoir ouvert la porte-monstre. Je connaissais son regard, pour l'avoir vu des milliers de fois chez des milliers d'administratifs-morts, je comprennais ce qu'il signifiait. Et malgré ma rage, malgré mon désir de m'enfuir et d'ensuite lutter contre le monde, de joindre les petits clans de résistants qui partout se créaient, j'obéis, m'exécutais. La mort dans l'âme, le coeur au bord des lèvres, j'entrais dans la pièce que le monstre gardait. J'y pris mon bagage et suivis la femme.

 

 

            Une nouvelle année commençait.

 

 

 

Samedi 23 mai 2009 à 15:38

Bondage


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Compression du corps mais aussi de l'esprit. Liens de cordes, de chiffons.
Contradiction : ressentez le mouvement dans un acte qui emprisonne, qui empêche de se déplacer.

Une pièce. Sombre. Le sol, mélange de parquet, de poussière, de fluides vitaux séchés et de débris inidentifiables. Des coussins éventrés décorent les lattes grinçantes. Des objets tranchants, d'autres contondants s'entassent à chaque coin de la chambre. Les murs, d'un rouge noirâtre. Moisissure. Des cadres. Vides. D'autres pas. Le portrait d'une vamp, clope au bec.  Les fenêtres, volets clos. Des rideaux, du même rouge sale et inquiétant. Déchirés. Une porte. Petite. Marques de coups, éraflures. La poignée, couleur bronze, vieillie par le temps. Au centre, une grande table basse recouverte d'une fourrure pleine de plis et de replis. Sombre, elle aussi. Sur cette surface vileuse, une femme. Les mains liées. Une vieille camisole de latex d'un blanc crasseux l'enserre. Un bâillon "ball gag" dans la bouche. La bave qui coule. Elle ne crie plus. Épuisée.
Un homme. De dos. Une femme. De dos. Ils regardent la créature qui se débat faiblement, enviable. Pourtant, ils ne sont que deux dans la mansarde. Il s'avance. La regarde. Par dessus son épaule gauche, on la voit. Elle tente de reculer. Elle échoue. Il sourit. Elle gesticule de plus belle. Désirable. L'homme porte un grotesque masque de zèbre. Il est enveloppé d'une ample cape. Noire. Il s'accroupit. Son bras droit sort des puissants froissements de la mante. Il approche sa main du visage effrayé de l'être, le caresse. Calme. Elle tente de hurler. N'y parvient pas. L'homme la gifle, murmure à son oreille des paroles qui se veulent apaisantes. Il fait glisser ses doigts sur le cou de la fille. Doucement d'abord. Il la sent frémir, perd le contrôle, l'étrangle. Elle gémit, elle remue. Il relâche la pression. Embrasse amoureusement les traces laissées par ses phalanges. Il s'en va.

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